Rencontrez Dr. Mario Cappelli de 1appel1clic.ca
Quel est votre titre officiel? Et votre poste actuel?
Je suis psychologue pour enfants; j’exerce depuis 30 ans. Je suis clinicien-chercheur principal à l'Institut du savoir sur la santé mentale et les dépendances chez les enfants et les jeunes depuis 2018, et ancien directeur de la recherche psychiatrique et en santé mentale à CHEO.
Pourriez-vous nous parler un peu de votre travail actuel?
Ce qui m'intéresse le plus, c'est que nous parvenions à fournir aux enfants, aux adolescents et aux jeunes adultes les bons types de services de santé mentale et de toxicomanie, au bon endroit, au bon moment, et d'une manière mieux intégrée. Notre objectif, c’est d’aider les familles à trouver les services nécessaires et à y accéder avec une telle efficacité et si consciencieusement qu'elles se retrouvent exactement là où il le faut sans avoir à réexpliquer leur cas 100 fois, ni à faire 100 recherches sur Google ni à passer 100 coups de téléphone. Notre second objectif, c’est de nous assurer que les divers cliniciens et organismes qui assurent les services sont sur la même longueur d'onde, pour qu’on puisse tous répondre aux besoins et aux ambitions qui comptent le plus pour les enfants et leurs familles.
Pourquoi avez-vous choisi de travailler dans ce domaine?
Quand j'ai commencé à travailler, notre mission était de faire en sorte que les familles et les jeunes se sentent à l’aise de demander et d’obtenir des soins de santé mentale ou de toxicomanie. Cette mission a évolué au fil du temps. Au fur et à mesure que les familles et les jeunes se sont sentis de plus en plus à l'aise de demander de l'aide, il est devenu de plus en plus nécessaire de garantir l'accès aux services pour tous ceux qui demandent des soins. Et les risques peuvent être élevés, si on échoue, surtout s’il s’agit de jeunes plus vulnérables. Nous avons perdu des jeunes du fait que nous n'avons pas pu répondre à leurs besoins à temps ou de façon significative ou intégrée. De même, si l’on n’est pas en mesure d’aider un enfant quand il en a besoin, ses problèmes risquent de se multiplier et d’avoir des conséquences pour lui dans d'autres domaines. Ce qui est encourageant, dans le cas des enfants et des jeunes, c'est que, si l’on intervient tôt et avec efficacité, on a de bonnes chances de réussir à les aider.
Après avoir exercé pendant tant d'années, quels changements ou tendances notables avez-vous constaté dans la santé mentale des jeunes Canadiens, en particulier dans notre région et dans notre province?
Ce que j’ai constaté en premier, c’est l'augmentation significative de la demande de services. Nous avons toujours su que beaucoup de jeunes ont besoin de services pour des problèmes très différents. La société a évolué depuis que j'ai commencé à exercer; les jeunes se sont exprimés et ils veulent être vus. Bien que la prévalence des maladies mentales graves n'ait pas vraiment changé, le nombre d'enfants qui ont accès à des services a augmenté.
À votre avis, quelle incidence la pandémie a-t-elle eue sur les enfants, les jeunes et les familles?
La pandémie a eu un effet négatif sur la santé mentale de nombreux jeunes et de nombreuses familles. Nous avons constaté une augmentation significative de l'anxiété, de la dépression, des visites aux urgences, des troubles alimentaires et de la consommation de substances. La pandémie nous a également forcés à reconnaître le fait que nous devons faire de plus gros efforts pour fournir des soins. Mais la prestation de soins doit se faire selon un modèle basé sur une intégration réfléchie, pour que nos jeunes et nos familles soient orientés vers les services de façon efficace et en maintenant une continuité dans les soins. Et c'est là, justement, qu'intervient 1appel1clic.ca - il s'agit d'une voie d’accès coordonnée vers les soins.
Comment êtes-vous impliqué dans 1appel1clic.ca?
Je fais partie de l'équipe qui évalue 1appel1clic.ca. Dans le cas de tout nouveau programme, il faut s’assurer que ce programme fait bien le travail qu'il est censé faire. Nous voulons obtenir la preuve que nous faisons ce qu’il faut et comme il le faut, et la façon de le prouver, c’est de recueillir les informations nécessaires pour déterminer si nous parvenons aux objectifs qui ont été établis au départ. Notre processus est très différent de la recherche traditionnelle, car les données sont recueillies en temps réel et analysées régulièrement. Le but ultime est d'ajuster et d'améliorer le service en cours de route. Il est extrêmement gratifiant de faire partie d’un comité d'évaluateurs qui rassemble des prestataires de soins, des familles, des jeunes, et des représentants de la collectivité et des hôpitaux.
Qu’est-ce qui vous a incité à devenir membre de l'équipe de 1appel1clic.ca et à lui faire don de votre temps et de votre expertise?
Mon rôle à l'Institut du savoir s’inscrit dans une optique provinciale. Ce qui m’intéresse, c’est de voir si l’on pourrait instaurer ce service dans d’autres collectivités de l’Ontario et au-delà de nos frontières. Il est possible que 1appel1clic.ca soit un modèle qui fonctionnerait n’importe où.
1appel1clic.ca vient de célébrer son premier anniversaire. À votre avis, quel impact ce service a-t-il eu sur ceux à qui il est destiné et sur la région qu'il couvre?
Je pense que nous avons fait de très gros progrès en l’espace d’un an. Ce qui me semble peut-être le plus grand bienfait, c’est que les enfants, les jeunes, les familles et les médecins de nos collectivités sont en mesure d'accéder aux bons services avec moins de difficulté, moins d'inquiétude, et une continuité dans les soins, puisque 1appel1clic.ca les met en rapport avec les services qui sont en mesure de répondre à leurs besoins et à leurs objectifs.
Avez-vous été surpris de l'accueil qui a été réservé à 1appel1clic.ca? Ou des besoins qui se sont manifestés?
La nécessité du service 1appel1clic.ca ne m’a pas surpris, mais, ce qui m'a surpris, c'est tout ce dont nous avons encore besoin. À mesure que nous évaluons le programme et que nous démontrons sa valeur, nous établissons des exigences de haute qualité et d'amélioration continue. C'est passionnant, et cela nous incite tous à réfléchir à ce que nous pourrons faire ensuite.
Est-ce que votre participation à 1appel1clic.ca vous a fait vivre des expériences émouvantes ou des moments particulièrement satisfaisants?
Ce que j'apprécie tout particulièrement, c'est le fervent engagement de chacun dans le travail que nous faisons. Tous les membres du groupe 1appel1clic.ca sont passionnés par cette recherche et les données, et ils ont tous hâte d’en apprendre davantage. Cet enthousiasme vous donne vraiment le sentiment de faire partie d’une équipe unie.
Les IRSC viennent de vous accorder une subvention de recherche d'un an pour étudier les données recueillies par 1appel1clic.ca. Pourriez-vous m'en dire un peu plus à ce sujet et m’expliquer l’objectif de cette recherche?
Les IRSC ont reconnu la nature unique de 1appel1clic.ca, du fait de sa capacité à saisir un ensemble de données plus complet. Ces données nous aident à comprendre le nombre d’enfants qui désirent recevoir des services, leurs besoins particuliers, et l'évolution de la gravité de ces besoins au fil du temps. En comprenant les demandes des jeunes en matière de santé mentale et de toxicomanie, nous pourrons déterminer si nous répondons à leurs besoins.
1appel1clic.ca recueille des données non seulement auprès des hôpitaux, mais aussi auprès de 25 organismes communautaires. Jusqu'à présent, nous avions un casse-tête qui ne comportait jamais tous ses fragments. Maintenant que ces 25 morceaux du puzzle sont réunis, nous pouvons voir l'ensemble du tableau. C'est très encourageant, puisque notre compréhension des besoins en matière de santé mentale et de toxicomanie est maintenant basée sur un ensemble de données plus complet, qui nous aidera à améliorer les soins destinés aux enfants et aux jeunes.
Quel est votre espoir pour l'avenir de 1appel1clic.ca et comment pourrions-nous soutenir au mieux sa croissance?
J'aimerais voir une intégration plus poussée avec d'autres prestataires, tels que des prestataires de santé mentale en milieu scolaire, des centres de santé communautaires, et, par la suite, j’aimerais voir 1appel1clic.ca dans toutes les collectivités. Il faudra plus que du financement; il faudra aussi un énorme engagement envers le changement, et l'acceptation de ce changement. C'est comme le dicton selon lequel tout le monde aime le progrès, mais personne ne veut changer. La réussite ne dépendra pas de ce que nous pensons être important, mais de ce que nos enfants, nos jeunes et nos familles attendent de nous.